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Moments de vie avec Cécile Hernandez

Trois fois médaillée olympique à Sotchi et Pyeongchang, triple championne du monde, Cécile Hernandez est une snowboardeuse talentueuse et passionnée qui est aussi journaliste et écrivaine.

Rencontre avec cette championne du cirque blanc qui a accepté de partager avec TopSkiNews quelques-uns des moments les plus forts d’une vie qui en comporte déjà plusieurs, avec de grandes joies mais aussi de très grandes peines.

Copyright photo Cécile Hernandez

TSN : Bonjour Cécile. Pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?

CH : Je m’appelle Cécile Hernandez et je suis originaire d’une petite ville, Saint Estève, proche des Pyrénées. J’ai 46 ans et je pratique le sport depuis que je suis toute petite. Je me suis d’abord épanouie dans le BMX avec une carrière au niveau international pendant de longues années marquées par plusieurs podiums en championnats du monde.

Je me suis ensuite orientée vers le Snowboard pour retrouver les sensations que j’avais connu dans le BMX : les virages, l’adrénaline, ce côté un peu sport extrême ! Dans ce sport de glisse que j’adore, j’ai été notamment plusieurs fois médaillée dans la discipline du SnowboardCross aux derniers Jeux de Sotchi (2014) et de Pyeongchang (2018).

Parallèlement à ces deux sports, j’ai suivi des études universitaires pendant 6 ans en lettres et communication des entreprises à Montpellier et Grenoble. A la fin de ces études, j’ai un peu laissé le sport de côté pour créer mon entreprise dans le domaine de l’événementiel sportif.

Un an après avoir lancé cette belle société qui marchait bien, est arrivé ce moment qui a fait basculer ma vie…

Avant le Snowboard Cécile Hernandez s’est épanouie dans le BMX.


TSN : Ce moment où tout bascule… Que s’est-il passé ?

CH : Nous sommes le 21 octobre 2002. Je me réveille chez moi à St Estève. Je pose mes jambes sur le sol pour sortir de mon lit, elles se dérobent. Je ne sens absolument plus rien des orteils jusqu’au bassin. Je tombe et je ne me relève pas. Je suis entièrement paralysée aux jambes.

En l’espace de quatre jours, je bascule dans le monde du handicap après qu’on met expliquer que je ne pourrais sans doute plus marcher comme avant. Le diagnostic est en effet sans appel : je suis atteinte d’une maladie grave et dégénérative du système nerveux qui s’appelle une sclérose en plaques.

Dans la vie, il y a parfois des moments forts d’émotions avec de la peur et de la peine : celui-ci en fait vraiment partie.

Il m’a fallu beaucoup de temps – trois années précisement – pour que j’accepte cette nouvelle vie et que j’arrive à me considérer comme une personne handicapée. J’ai dû faire des deuils, notamment celui du sport. Personne en effet dans le milieu médical ni dans mon entourage n’avait songé à me dire que je pourrais envisager de m’épanouir dans le handisport en trouvant un sport qui aurait pu me correspondre.

Ma résilience a été l’écriture. J’ai pu ainsi raconter mes deuils et ce handicap qui a fracassé la porte d’entrée de ma vie. Je me suis reconstruite dans cette écriture thérapeutique en publiant deux livres dont le premier « La guerre des nerfs » a bien marché.

J’ai ensuite été conférencière et formatrice sur les situations de handicap. J’ai aussi frappé à la porte de grands médias et je suis devenue rédactrice en chef de la rubrique handisport au Figaro et chroniqueuse sur Europe 1.

Copyright photo Cécile Hernandez

TSN : Vint ensuite quelques longues années plus tard un moment de grand bonheur dans votre vie…

CH : C’est la naissance de ma fille en 2007. Malgré mon handicap et après avoir vérifié que ma maladie n’était pas héréditaire, je me suis sentie capable de donner la vie. Et ensuite d’aider une petite vie à grandir.

Cela a été un gros bouleversement pour moi à tel point que cela m’a aidé à reprendre le dessus sur ma maladie. Non pas que ma fille ait été une revanche sur la vie mais la naissance de ma fille a été un tremplin pour ma vie.

J’étais déjà une battante mais elle m’a donné encore plus l’envie d’exister en tant que maman pour qu’elle soit fière de moi.

Ma fille se prénomme Victoire-Eléonore : Victoire car sa naissance en a été une vraie victoire sur la maladie et sur le fait que cette naissance a été difficile. Eléonore pour atténuer un peu le prénom Victoire, pas toujours facile à porter quand on a une maman handicapée.

Son deuxième prénom est Olympe parce qu’en 2004, en pleine période de mon deuil du sport, je suis allée à Athènes. J’ai pu toucher de la main le podium olympique. J’ai pleuré à cet instant en me promettant que si un jour j’avais une fille, je lui donnerais ce prénom.

TSN : Onze ans après le diagnostic qui bouleverse votre vie, vous faites une rencontre qui change le cours de celle-ci…

CH : Le 14 décembre 2013, je suis à Valmorel envoyé par le Figaro pour couvrir l’événement « les micros d’or ». Dans cette station village savoyarde que j’adore, je fais la rencontre de Patrice Barattero, un snowboarder qui est amputé d’une jambe.

Nous engageons la conversation et je lui explique que je souffre d’un handicap invisible qui m’a fait stopper toute activité sportive. « C’est trop cool. On recherche des personnes comme toi en équipe de France Handisport », me répond-il !!

Dans les minutes qui suivent, je prends un Snowboard au magasin de location. Je chausse, je m’élance et je tombe. J’ai des larmes aux yeux et des frissons [émotion dans la voix de Cécile].

Et je me relève ! C’est un moment fou de ma vie. Il contraste tellement avec celui de 2002 où je suis tombée et je ne me suis pas relevée… Je continue, je tombe, il m’aide à me relever. Et tout bascule dans ma tête : je sais que c’est ça désormais ma vie.

Patrice me dit alors « Avec le niveau que tu as, si tu t’entraînes et si cela se passe bien, tu pourrais faire une médaille aux Jeux ! »

Un mois plus tard, le 14 janvier, la Fédération m’obtient une White Card pour courir en coupe du monde à Copper Mountain aux Etats-Unis, compétition à laquelle je n’ai jamais participée.

Et enfin, le 14 mars 2014 je suis au départ des Jeux paralympiques à Sotchi pour décrocher la première médaille d’argent dans l’histoire du Snowboard paralympique français.

C’est une belle histoire de 14 !

Cécile Hernandez médaillée d’argent à Sotchi -Copyright photo Grégory Picout

TSN : Racontez-nous cet autre moment exceptionnel de votre vie qui s’est déroulé juste à côté de chez vous dans la station de ski espagnole de La Molina…

CH : En février 2015, je suis au départ des championnats du monde de SnowboardCross. Je suis malheureusement malade avec beaucoup de fièvre et une grosse toux. A l’hôpital, on me dissuade de poursuivre et mon coach me déconseille fortement de prendre le départ. Mais l’envie est trop forte…

Je participe à la reco de la piste qui comportent deux manches. A la fin du premier run, j’aperçois mon père avec ma fille dans la raquette d’arrivée. Elle court vers moi, je la prends dans mes bras et il se passe quelque chose d’invraisemblable.

Soudain, je suis reboostée comme jamais, j’ai un gros shoot d’adrénaline. Je remonte au départ et je me dis : Je vais gagner avec mes tripes, avec mon cœur, pour ma fille.

Et je gagne. Je suis championne du monde. Je me revois encore avec la médaille d’or autour du cou et les pieds sur la plus haute marche du podium à écouter la marseillaise retentir.

Cela a été un moment très fort de ma vie. C’était génial !

A La Molina, Cécile Hernandez va chercher avec ses tripes et son coeur le titre de Championne du monde – Photo copyright Cécile Hernandez

TSN : Y a-t-il un moment de rêve que vous aimeriez vivre désormais ?

CH : Oui, c’est le moment qui me fait lever tous les matins, m’entraîner, dormir et manger tous les jours. J’ai envie de faire retentir à nouveau cette marseillaise, de voir à nouveau le drapeau bleu-blanc-rouge monter dans le ciel.

Je fais tout pour y arriver et je m’y prépare depuis trois ans, depuis les derniers jeux. Dans les salles d’entraînement quand je soulève de la fonte, quand je suis sur mon Snowboard, je travaille uniquement dans l’optique de ces Jeux paralympiques de Pékin de 2022.

Quand j’ai raté d’un rien l’or à Pyeongchang, je me suis dit : dans 4 ans, je la veux cette médaille. J’ai eu l’argent deux fois, le bronze une fois. Le métal qui me manque, c’est l’or olympique.

Ce moment, j’en rêve depuis trois ans. Devenir championne Olympique aux Jeux Paralympiques de Pékin l’année prochaine.

Copyright photo Cécile Hernandez

Pour suivre les performances de Cécile Hernandez dans les prochains mois :

Elle disputera les championnats du monde en janvier 2022 à Lillehammer, véritable répétition pour les Jeux paralympiques qui se dérouleront à Pékin du 4 au 13 mars 2022.

D’ici là, vous pouvez bien entendu suivre Cécile sur les réseaux sociaux :

Facebook : Cécile Hernandez athlète parasnowboard

Instagram : Cécile Hernandez Athlète

Twitter : @CECILEH

LinkedIn : Cécile Hernandez