Passionnée de montagne, de ski et d’alpinisme depuis son plus jeune âge, Louise Rigaud fait partie de l’équipe de France de ski alpinisme Jeunes depuis 5 ans.
Interview depuis Font Romeu avec Louise qui s’est lancée le pari de progresser encore l’hiver prochain et de monter sur les podiums internationaux U20 de ski alpinisme.
Avec un rêve au bout de ses spatules : porter un jour les couleurs tricolores à des Jeux Olympiques d’hiver.
Copyright photo François Laurens/Hans Lucas
Bonjour Louise. Pour celles et ceux qui ne vous connaissent pas encore, pourriez-vous vous présenter ?
J’ai 19 ans et je suis originaire de Toulouse. Depuis mon plus jeune âge, je suis passionnée de montagne, de ski et d’alpinisme. J’ai chaussé les skis dès l’âge de 2 ans dans la station pyrénéenne de Peyragudes. Et j’ai gravi à 10 ans mon premier 3000, l’Aiguille du Tour, dans le massif du Mont-Blanc. Puis j’ai enchaîné d’autres ascensions comme le Mont Blanc, l’Aneto et le Grand Paradis.
Après des résultats prometteurs dans des compétitions de ski alpinisme, j’ai intégré l’équipe de France Jeunes il y a 5 ans !
Parallèlement à mon projet sportif, je poursuis des études de médecine et je viens de rentrer en 2e année à la Faculté de médecine de Toulouse.
Cette double activité est essentielle pour moi. Tout d’abord parce que le ski alpinisme et la médecine me passionnent énormément. Ensuite parce qu’elles se complètent très bien. Je peux mieux comprendre les problématiques du sportif. Enfin parce que le ski alpinisme ne garantit pas aux athlètes de vivre de leur sport…
Jongler entre ces activités me permet d’avoir un équilibre et représente une part considérable dans ma réussite.
En quoi consiste le ski alpinisme ?
C’est une discipline sportive qui se pratique en montagne pour la plupart du temps sur des itinéraires hors-pistes. Le but est d’enchaîner des montées et des descentes en utilisant un matériel adapté et très léger. Les skis sont équipés de fixations spéciales permettant de libérer le talon pour la montée et de le verrouiller pour la descente.
Les peaux de phoques qui nous ont permis de grimper sont retirées afin de commencer la descente.
Comment vous est venue cette passion pour le ski alpinisme ?
Licenciée au club Kids Bulle de Peyragudes, j’ai commencé par des compétitions de ski alpin. L’apprentissage du ski de descente faisait partie de mon éducation et tenait à cœur à mon père, guide de haute montagne et entraîneur de ski.
Très souvent, il m’emmenait en montagne. J’ai toujours énormément aimé cet environnement qui permet d’être proche de la nature. Et puis un jour, j’ai participé à une compétition de ski alpinisme… Cela m’a beaucoup plu, notamment en raison de l’effort d’endurance que je ne retrouvais pas en ski alpin. J’ai donc continué en disputant d’autres compétitions. A l’époque, l’équipe régionale pyrénéenne cherchait des jeunes et m’a contacté. Je les ai rejoint.
Puis je me suis licenciée au Club de Font Romeu car c’était le plus simple pour intégrer le pôle espoir du ski alpinisme français.
Le ski alpinisme, c’est 5 disciplines différentes. Quelle est celle où vous avez obtenu les meilleurs résultats ?
Effectivement, le ski alpinisme recouvre 5 disciplines : l’individuelle, la course par équipes, la course longue distance, le sprint et le relais. Seules deux d’entre elles, le sprint et le relais, seront inscrites pour la première fois au programme des prochains Jeux Olympiques de Milan-Cortina en 2026.
Lorsque l’on est jeune et qu’on pratique ce sport à haut niveau, on ne se spécialise pas. Pour autant, ma discipline de prédilection, celle où j’ai obtenu mes meilleurs résultats et pour laquelle je suis sélectionnée en équipe de France, c’est le sprint.
Cela consiste en une montée et une descente rapide, tracées sur un parcours très visuel et spectaculaire. On enchaîne des parties de glisse sur les skis et des séquences de montées avec les skis sur le dos. Il y a beaucoup de manipulations à effectuer. Elles doivent être très rapides pour éviter de perdre du temps : enlever les skis, enlever les peaux de phoques, mettre les skis sur le dos, les remettre aux pieds…
Des phases de qualification permettent une sélection en quart, puis demi-finale afin d’accéder à la finale.
L’effort est très intense et dure environ 3 minutes par passage.
Quels sont les moments forts de votre carrière dont vous êtes particulièrement fière ?
Il y a d’abord mes titres de championne de France de sprint en 2020 et de vice-championne de France en 2022 et 2023. J’ai alors pris conscience que je faisais partie des meilleures françaises, que j’accédais au haut niveau et que je pouvais disputer des compétitions internationales. Cela été un grand moment, un vrai déclic dans ma carrière.
Ensuite, la saison dernière j’ai accédé pour la première fois à une finale de Coupe du monde de sprint courue en première année U20 à Villars en Suisse. Pour cela, j’ai dû franchir la qualification qui est un contre la montre (seules les 12 meilleures passent en demi-finales), puis faire partie des 3 meilleures en demi-finales pour accéder ensuite à la finale. Je me suis classée 6e en finale et cela a été une très grande satisfaction pour moi.
J’ai ensuite renouvelé ce résultat à la Coupe du monde de sprint de Val Louron en France où j’ai de nouveau accédé à la finale pour finir avec une 6ème place.
Comment vous préparez-vous pour votre prochaine saison ?
Je m’entraîne actuellement au sein du pôle Espoir à Font Romeu qui me permet d’accéder à des installations performantes au sein du Creps comme les salles de musculation, la chambre hypoxique ou encore l’unité de récupération.
Font Romeu est un centre d’entraînement situé en altitude (1800 mètres). Comme mes compétitions se déroulent en montagne, vivre et m’entraîner à ce type d’altitude toute l’année me permet de m’acclimater très vite les jours de courses.
Je continue aussi à travailler ma préparation mentale, toute aussi importante que ma préparation physique, avec Olivier Leprêtre, qui est notamment préparateur mental du stade toulousain.
Je souhaite développer ma confiance en moi et mon état d’esprit afin d’arriver à créer mes routines d’avant course qui me permettent de m’ancrer dans la compétition et de moins stresser. Cela fait un an que je travaille avec Olivier et je ressens vraiment la différence et les bénéfices de cette préparation sur ma performance !
Quel est votre programme de courses pour la prochaine saison ?
Je serais encore en U20, cette fois en 2e année. Ma sélection en équipe de France dépendra de mes résultats sur la première course en Coupe du monde qui aura lieu à Méribel Mottaret le 9 décembre, et aux Championnats de France qui sont programmés ensuite à Courchevel.
J’espère participer aux Championnats d’Europe U20 organisés à Flaine le 8 janvier. Puis être au départ de 3 autres étapes de Coupe du monde : Bormio en Italie (8 février), Berchtesgaden en Allemagne (17 février) et Molde en Norvège pour les Finales (13 mars).
Sans oublier un défi sportif en janvier à Font Romeu qui me tient particulièrement à coeur !
De quel défi s’agit-il ?
Il s’agit d’un défi en ski alpinisme baptisé « inclusion & performance summit ». Son ambition est de démontrer que l’inclusion associée aux valeurs sportives est un levier d’engagement, d’innovation et de performance.
Il se déroulera le 13 janvier à Font Romeu Pyrénées 2000 et sera précédé d’une grande conférence le 9 novembre à Toulouse avec la participation de grands acteurs du monde du sport, de l’inclusion et du monde de l’entreprise notamment Salomon, Humanity Lab d’Airbus, l’ANDRH…
Ce défi, construit en partenariat avec Level Up, InLab’DRH et le club ALTICIM, permettra de lever des fonds pour accompagner des projets sportifs et professionnels de personnes en situation de handicap ainsi que soutenir de jeunes skieurs alpinistes dans la perspective des prochains Jeux Olympiques.
Je suis convaincue que le sport est un outil puissant pour se construire et rassembler au-delà des différences en apprenant de chacun. Et puis, casser les barrières sociales et soutenir l’inclusion et le handicap sont des engagements qui sont très importants pour moi.
Quels sont vos objectifs sportifs pour la prochaine saison ?
Mes objectifs sont centrés sur le Sprint. Je vise le titre de championne de France de sprint. Et ensuite aller décrocher des podiums en Coupe du monde Jeunes et aux championnats d’Europe.
Le ski alpinisme (sprint et relais mixte) sera inscrit pour la première fois au programme des Jeux Olympiques de Milan-Cortina en 2026. Est-ce qu’une sélection fait déjà partie de vos rêves ?
Aujourd’hui, je focalise toute mon énergie sur mon apprentissage et ma progression. Je m’entraîne au quotidien pour atteindre un plus haut niveau et pour réaliser mon rêve qui est de participer un jour aux Jeux Olympiques.
Cela dit je suis encore jeune et j’ai beaucoup à apprendre. Les sélections pour 2026 seront effectuées dès la saison 2024-2025 !
J’espère que le ski alpinisme fera partie du programme des Jeux Olympiques en 2030.
Evoluer dans le ski alpinisme à haut niveau est coûteux. Recherchez-vous des partenaires pour vous accompagner ?
Je suis actuellement à la recherche de nouveaux partenariats financiers mais aussi matériels pour m’accompagner dans mon double projet sportif et universitaire.
Mon budget de saison se situe entre 12 000 et 15 000 euros. Je vais lancer une campagne de communication très prochainement pour faire connaitre mon double projet et susciter l’intérêt de partenaires.
Les valeurs d’excellence, d’engagement en faveur de l’inclusion et de l’environnement sont primordiales pour moi.