Pour Victor Muffat-Jeandet, la carrière d’un athlète est tout sauf un long fleuve tranquille. Entre doutes persistants, remises en question et défis personnels, le skieur de Val d’Isère a dû puiser dans ses ressources les plus profondes pour se redécouvrir.
Récit d’une belle leçon de résilience qui montre que la carrière d’un skieur de haut niveau, ce n’est pas seulement performer, mais aussi savoir se relever !
Photo copyright Agence Zoom/Alexis Boichard
Un hiver dernier très lourd
La saison dernière a été particulièrement éprouvante pour Victor Muffat-Jeandet. « L’hiver, il a été très lourd », confie-t-il, visiblement marqué par l’expérience. Enchaînant les courses sans qualification, le doute s’est installé, et avec lui un poids psychologique qui progressivement grignote la confiance. « Tout le mois de janvier, j’ai enchaîné au moins 7 ou 8 courses sans qualification en deuxième manche ! J’avais l’impression que j’avais perdu le truc », se souvient-il.
Durant cette période de remise en question, Victor se questionne fortement, notamment sur son potentiel. Mais loin de l’abattre, cela renforce sa détermination à se prouver qu’il était encore capable de très bien skier.
Le déclic à Aspen
Le tournant de la saison est arrivé lors du premier géant d’Aspen en mars dernier. Victor connait pourtant la pire semaine de préparation de sa carrière. Rien ne va ! « J’ai failli ne pas prendre le départ d’Aspen, c’était vraiment trop glace », avoue-t-il. Mais, malgré le découragement, Victor se remobilise, se reconcentre et va signer le 11e chrono de la première manche !
Aspen s’est avéré être la leçon d’humilité dont Victor avait besoin pour se reconnecter avec son potentiel. « Je me suis recentré sur moi », raconte-t-il, retrouvant en lui-même des ressources et prouvant qu’il était encore capable de performer, même dans des conditions extrêmes comme celles rencontrées à Aspen.
« Cela a été une belle leçon, ça m’a vraiment fait du bien. Je me suis montré à moi-même que je savais encore bien skier », indique Victor Muffat-Jeandet.
Le pèlerinage des courses FIS
À la fin de la saison, Victor décide de renouer avec les compétitions FIS et entreprend un véritable pèlerinage. « J’en ai fait 12 à peu près, en 3 semaines », se souvient-il, avec un certain enthousiasme. Victor part notamment seul à Andorre, retrouve des copains qu’il avait un peu perdu de vue… et remporte le géant et le slalom de Soldeu !
Ce retour aux sources lui a permis de gouter à nouveau le plaisir pur de la compétition. « J’ai adoré cela. Ça m’a fait trouver des repères, notamment dans la cabane de départ. Comment je dois me sentir avant de m’élancer… Et ça, je l’avais perdu. » Cette série de courses, sans les pressions rencontrées en Coupe du monde, lui a rappelé pourquoi il aimait skier et l’a aidé à retrouver un certain équilibre.
Des vacances salvatrices…
Les vacances cet été sont venues lui apporter un répit bien nécessaire. « Je me suis rendu compte que j’étais très fatigué, nerveusement aussi », admet Victor, qui a enchaîné deux années de blessures sans véritable moment de repos. Pour la première fois, il se permet de couper, de relâcher la pression. Et, fait incroyable quand on connait Victor, il n’est pas allé skier cet été à l’Iseran à Val d’Isère !
Cette pause salvatrice lui redonne l’énergie nécessaire pour se projeter vers l’avenir avec une sérénité retrouvée.
Le tournant de sa carrière en Amérique du Sud !
C’est lors de la Coupe d’Amérique du Sud, disputée à l’occasion du stage à Ushuaïa en septembre, que Victor connaît ce qu’il qualifie de « tournant de sa carrière ». En remportant cette compétition, il se prouve qu’il pouvait encore atteindre les sommets. « Je pense que je n’ai jamais vécu un moment aussi important », affirme-t-il.
Ce succès le fait revenir en effet dans le cercle des 50 meilleurs mondiaux pour deux ans. « Mon horizon s’est dégagé d’un coup, je trouve que c’est une sérénité incroyable », précise Victor, même si ce chemin exige de « continuer à cravacher ».
Victor Muffat-Jeandet tient là un bel accomplissement qui lui offre une nouvelle perspective pour sa carrière.
Géant et slalom ou géant ou slalom ?
La saison dernière, Victor doit faire face à un paradoxe. Il avait des bons dossards en géant, mais n’avais pas son meilleur ski, loin de là. Et en slalom, il avait le ski, mais n’arrivait pas à s’exprimer sur les courses.
Victor Muffat-Jeandet est l’un des derniers athlètes tricolores à courir les deux disciplines, le géant et le slalom. Bien conscient des sacrifices que cela implique, il doit faire face dans ces deux disciplines à des spécialistes ultra-entraînés.
Pourtant, il ne peut se résoudre à abandonner l’une des disciplines pour l’autre : « Quand je fais une très bonne séance de géant et que je me fais super plaisir, je me dis que je ne peux pas arrêter cette discipline. »
Ce choix, bien qu’ardent, fait partie de son identité d’athlète, qui trouve son épanouissement dans la complexité et les défis que chaque discipline lui impose. « Je me suis prouvé à moi-même que je pouvais à nouveau réussir. »
C’est reparti pour une nouvelle saison
Victor Muffat-Jeandet a pris son premier départ en Coupe du monde en février 2009 à l’occasion du Géant de Kranjska Gora en Slovénie. Il a intégré le Groupe Coupe du monde de l’équipe de France de ski alpin depuis 2012.
Dimanche, Victor s’élançait pour la 9e fois de sa carrière sur le géant de Sölden. 28e à l’issue de la première manche (juste devant un certain Marcel Hirscher !), Victor s’est classé 26e après le second tracé, marquant ainsi des premiers points précieux.
« La journée a été positive. On voit que ce sont les petits détails qui font les grosses différences. Il va falloir bien analyser pour rectifier avant la prochaine course », a commenté Victor au micro de la Fédération.
Victor Muffat-Jeandet nous donne désormais rendez-vous entre les piquets serrés sur la Black de Levi en Finlande (17 novembre), puis à Gurgl en Autriche (24 novembre).