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Alexis Pinturault : « Retrouver cette capacité à performer et à skier extrêmement vite ».

À 34 ans, Alexis Pinturault entame le dernier chapitre de sa carrière. Après une lourde blessure en janvier lors du Super-G de Kitzbühel, le skieur de Courchevel avance avec détermination sur le long chemin du retour vers le haut niveau. Revenu dans le giron fédéral et recentré sur le géant, sa discipline de cœur, Alexis Pinturault fait le point sur sa forme physique, nous parle de son programme de préparation, et des défis à relever avant le grand rendez-vous des Jeux Olympiques de Milan-Cortina en février prochain.

Ou en est-tu de ta préparation physique après ta blessure sur le Super-G de Kitzbühel en janvier dernier ?

J’en suis presque à la fin. On termine actuellement un très gros bloc de préparation physique, car j’ai entamé ma reprise dès la fin mars, bien plus tôt que les autres. Dès avril, j’ai pu reprendre assez rapidement et normalement la musculation et le vélo. Deux activités qui m’ont assez longtemps accompagné en raison de quelques problèmes liés à la blessure, notamment au tendon d’Achille et au tendon de l’ischio.

Ces deux difficultés ont perduré dans le temps – presque six mois depuis ma blessure à Kitzbühel -, et j’ai dû jongler avec pendant ma réathlétisation pour pouvoir pratiquer d’autres activités. Aujourd’hui, je ressens encore certaines choses, mais rien ne m’empêche de m’entraîner normalement.

Cela fait plaisir. Je n’ai ni gêne, ni compensation et très peu de contraintes dans tout ce que je fais. Au contraire, il s’agit uniquement de faire des adaptations d’intensité. Je peux tout faire jusqu’à 100% du maximum.

Une séance de préparation physique d’Alexis Pinturault

Que te reste-t-il à faire au niveau de ta préparation physique ?

Après le prochain stage de ski à Saas Fee, je passerai des tests physiques à la mi-août, pour vraiment savoir où j’en suis par rapport aux années précédentes. Ces tests auront lieu en Autriche, chez mon partenaire Red Bull.

C’est là-bas que je dispose de toutes mes données de référence : depuis près de dix ans j’y effectue les mêmes exercices sur des machines que je connais bien. Cela permet de comparer et c’est essentiel pour évaluer précisément où j’en suis.

Qu’attends-tu du stage de ski cette semaine à Saas-Fee, en Suisse ?

C’est déjà mon troisième stage depuis ma blessure. Le premier a surtout été une remise en route sur les skis pour retrouver des sensations, observer les réactions de mes genoux et identifier d’éventuelles douleurs. J’ai aussi repris tranquillement le passage entre les portes pour retrouver un certain rythme et les bons automatismes.

Le deuxième stage a permis de renforcer les acquis mis en place au printemps.

Ce troisième stage à Saas Fee marque une nouvelle étape. On va doucement revenir sur les chronos et entre les piquets avec un peu plus d’intensité qu’avant.

L’idée, c’est d’augmenter progressivement l’intensité, mais pas forcément la complexité. Elle viendra plus tard notamment à Ushuaïa avec des pistes plus difficiles et plus glacées.

Tu as retrouvé le groupe technique fédéral après plusieurs années très réussies dans ta structure privée. Quelles sont tes premières impressions ?

On n’a pas encore passé beaucoup de temps ensemble mais c’est un groupe que je connais bien. Je les côtoie en effet tout au long de l’hiver sur les Coupes du monde. Je connais aussi bien le fonctionnement du groupe fédéral, puisque j’y ai passé six ou sept ans de ma carrière. C’est un fonctionnement qui est un peu différent de ce que j’ai connu dans ma structure privée.  

Quand j’ai quitté le groupe fédéral, j’étais l’un des plus jeunes. Aujourd’hui, je le réintègre et je suis l’un des plus vieux d’une certaine manière. Donc forcément, il y a sa place et un nouvel équilibre à trouver.

Je trouve que c’est très sympa à vivre avec de belles opportunités d’échanges avec les plus jeunes. J’ai pas mal de questions de leur part, et si je peux leur apporter quoi que ce soit, je le fais volontiers.

Tu vas finaliser ta belle carrière en te concentrant désormais sur le géant. Quelles ont été les principales évolutions de cette discipline ces dernières années ?

Il y a eu effectivement des évolutions, notamment en matière de matériel. Les skis ont été rallongés pour gagner en stabilité, ce qui a naturellement exige une phase d’adaptation. Certaines marques ont bien géré cette transition, d’autres un peu moins bien, et cela s’est ressenti dans les performances des athlètes.

C’est toujours une adaptation qui peut être plus ou moins rapide. Ceux qui prennent de l’avance peuvent garder un coup d’avance un certain temps, alors que ceux qui accusent du retard peuvent mettre un moment avant de retrouver un bon équilibre.

Donc, le matériel a évolué et aujourd’hui, il y a toujours des athlètes qui skient avec des skis longs, d’autres avec des skis plus courts. Mais les skis plus courts ont dû gagner en stabilité, pour compenser le déficit qu’ils avaient vis-à-vis des skis plus longs.

L’enjeu était là, et c’était ce sur quoi les différentes marques et athlètes ont travaillé dernièrement. Mais quoi qu’il en soit, le ski reste un sport dépendant du matériel, où on essaie toujours d’apporter des optimisations, des améliorations, pour aller toujours plus vite.

Dans les grandes lignes, quel est ton programme de préparation d’ici Sölden ?

A court terme, il y a le stage à Saas Fee de quatre jours cette semaine, suivi de mes tests physiques vers la mi-août, avant de poursuivre la préparation.

Ensuite, fin août, on s’envolera pour l’hémisphère sud, direction Ushuaïa, pour un gros stage de ski de plus de trois semaines.

À notre retour, j’aurai une petite semaine de coupure après ce bloc intense. Puis, avant le début de la saison, je ferai une dernière séquence de préparation physique.

Enfin, on retournera rapidement sur les skis — probablement en Autriche — pour la dernière ligne droite, avec les ultimes réglages avant le géant d’ouverture à Sölden.

Au vu de ta forme actuelle et de ton expérience du haut niveau, te sens-tu capable de skier deux manches à haute intensité à Sölden pour aller accrocher les meilleurs ?

Ce n’est pas facile de répondre à cette question, pour plusieurs raisons. La première, c’est que je n’ai pas encore assez skié et je n’ai pas assez eu de comparaisons, donc je ne sais pas spécialement où j’en suis sur les skis. Physiquement, ça va bien, mais sur les skis c’est encore un peu tôt pour me situer précisément.

Ensuite, je vais m’élancer avec un dossard assez élevé, le 28 en principe. Ce qui en géant peut déjà couter quelques dixièmes en fonction des conditions de course.

Cela dit, l’objectif, c’est de retrouver cette capacité à performer et à skier extrêmement vite. Peut-être pas à Sölden, mais plus ce sera tôt et mieux ce sera.

La dernière fois qu’Alexis Pinturault est monté sur un podium en géant ? Le 12 mars 2023 à Kranjska Gora – Photos copyright Agence Zoom

Quel est ton principal défi en géant d’ici février et le grand rendez-vous olympique de Milan Cortina 2026 ?

Mon premier défi, c’est avant tout de regagner en rapidité technique et d’être beaucoup plus performant pour pouvoir faire partie des meilleurs. Evidemment, mon dossard pourra avoir un impact, mais l’essentiel c’est d’endiguer cela par mon niveau technique. Quand un skieur est bon, qu’il va vite, peu importe le dossard, il arrivera à aller chercher les meilleurs.

Mon objectif premier, c’est retrouver un excellent niveau technique et d’exécution pour pouvoir rivaliser réellement avec les meilleurs.

Quels sont les éléments primordiaux de nos jours pour devenir un champion de ski ?

Je crois qu’avant tout, il faut prendre pas mal de plaisir. Aujourd’hui, on incite tous les jeunes à être plus performants, plus compétitifs, à enchaîner les séances de ski ou faire leur sport – en technique plus particulièrement – avec un volume beaucoup plus important que ce qu’on faisait à l’époque.

Je pense qu’il ne faut pas oublier cette perspective-là. Ce qui permet d’aller le plus loin et toujours plus haut, c’est quand même le plaisir de faire ce qu’on fait. Sans ça, les choses s’arrêtent beaucoup plus vite.

Pour moi, la priorité, surtout chez les jeunes, c’est qu’ils s’amusent dans ce qu’ils font et qu’ils ne sentent pas contraints et forcés de travailler pour pouvoir s’épanouir dans le sport qu’ils pratiquent.

C’est le plus important, parce que grâce à cela, ils pourront faire énormément de choses ou en tout cas beaucoup plus de choses que tous les autres qui auront moins ce plaisir.

Si tu pouvais changer quelque chose aujourd’hui dans ta carrière, ça serait quoi ?

Je ne changerais rien ! Pour la simple et bonne raison que je fais partie de ces personnes qui croit que c’est grâce au chemin qu’on parcourt qu’on apprend énormément. Et ce n’est pas tant la finalité le plus important, mais c’est le chemin qu’on prend.

C’est ce qui nous forme. C’est ce qui nous fait grandir. C’est ce qui nous fait évoluer. Donc moi, je ne changerais rien. C’est ce qui fait que je suis Alexis Pinturault aujourd’hui.