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Mathieu Faivre

Mathieu Faivre, l’histoire de ses 42 jours avant Cortina

Avant de retrouver le circuit Coupe du monde à Kranjska Gora, le double champion du monde Mathieu Faivre était de passage à Paris ce weekend. Pendant mon interview, je lui ai demandé de me raconter la séquence allant du géant d’Aldelboden le 8 janvier dernier à celui des mondiaux de Cortina le 19 février.

C’est l’histoire de la consécration du skieur d’Isola 2000 dans un Géant dont l’issue n’était absolument pas inscrite dans le meilleur de ses rêves 42 jours avant.

Tout démarre dans le temple du géant à Adelboden. Nous sommes le vendredi 8 janvier. Le début de saison de Mathieu Faivre n’a pas été exceptionnel. Le skieur d’Isola 2000 vient de terminer la première manche de ce premier géant programmé sur la Chuenisbärgli. Mathieu se tourne vers ses coachs et leur dit « Bon les gars, y a un truc qui ne va pas. Je ne suis pas au niveau, je ne suis pas performant ».

Effectivement son résultat n’est pas de nature à enchanter Mathieu :  il terminera ce premier Géant 17e à plus de trois secondes d’Alexis Pinturault qui vient de le remporter magnifiquement. L’écart avec Alexis est monstrueux et pourtant Mathieu a le même équipementier que lui, Head. De quoi s’interroger !

Le lendemain, Mathieu réussit tout juste un Top 15 alors que la France du ski célèbre la seconde victoire en deux jours d’Alexis Pinturault. Au micro de Laurent Chrétien, responsable Médias de la FFS, Mathieu laisse transpirer sa déception et surtout ses interrogations.

« Depuis quelques temps, il y a toujours un secteur ou plusieurs dans lesquels je me pose des questions sur ce que je suis en train de faire. Et ça vient du manque de confiance ».

Mathieu Faivre – Adelboden – Janvier 2021

Le travail de reconquête doit démarrer sans attendre mais comment ? Mathieu profite du trou offert par le calendrier des courses de géants. Plus rien jusqu’aux mondiaux de Cortina en février !  « On s’est tous posé, on a discuté. On a essayé de comprendre ce qui allait et surtout ce qui n’allait pas. On s’est dit ce qu’on voulait se dire ».

Cette discussion, Mathieu la mène avec ses trois coachs et son technicien ski. Il en profite aussi pour faire son autocritique dans sa manière de fonctionner aux entraînements et dans sa façon de vouloir progresser : « Il y avait trop de moments où je voulais travailler techniquement. J’en avais oublié tout simplement de skier et d’aller vite ».

L’équipe décide alors de faire des petits changements, à commencer par les lieux d’entraînement. Il leur fallait trouver rapidement des pistes plus compliquées qui se rapprochent le plus possible des conditions rencontrées en Coupe du monde.

« On s’est dit aussi qu’Alexis venait de remporter deux victoires en Coupe du monde à Adelboden avec une avance considérable, et qu’ayant le même équipementier que lui, on avait dû passer à côté de quelque chose ! ».

En se basant sur tous ces constats, Mathieu et son équipe décident de mettre en place une stratégie qui devait répondre à la question : comment à partir de ces constats travailler pour réaliser la meilleure fin de saison possible ?

 » On a mis cette stratégie en place et on s’y est tenu « 

Mathieu Faivre

Cette stratégie va s’appuyer notamment sur du nouveau matériel. Comme d’autres skieurs, Mathieu change de skis « On est simplement passé d’un ski de 1m93 à 1m98. Il n’y a rien eu de révolutionnaire, on a juste rallongé la taille du ski ».

Dès le lendemain d’Aldelboden, Mathieu repart très vite à l’entraînement pour tester pendant trois jours ce nouveau matériel en skiant notamment sur une piste de Coupe du monde utilisée par les dames.  

Après une pause chez lui, Mathieu reprend le chemin des pistes de ski deux semaines avant les championnats du monde de Cortina. Direction les excellentes pistes autrichiennes de Reiteralm afin de préparer dans les meilleures conditions possibles les mondiaux. Mathieu s’entraîne avec Thibaut Favrot, Cyprien Sarrazin et également Victor Muffat-Jeandet lorsque son programme lui permettait (Victor se préparait aussi au slalom et au combiné des mondiaux). Les entraînements s’effectuent aussi avec les croates et les russes. Une séance commune est organisée avec Alexis Pinturault. « C’était des partenaires d’entraînement de luxe et nous avions soulevé cette problématique après Aldelboden, c’était une excellente chose ».

Durant la séquence commune avec Alexis, Mathieu peut se comparer avec le meilleur géantiste du moment : « Il était un peu devant, mais cela se jouait à pas grand-chose ». Bonne nouvelle, le mois de janvier durant lequel Mathieu devait mettre un énorme engagement avec beaucoup de risques pour sortir des manches à peu près correctes semblait s’éloigner.

« Ce n’était que des entraînements mais je sentais vraiment à ce moment de ma préparation que cela me demandait beaucoup moins d’énergie et qu’il y avait beaucoup plus de sécurité dans mon ski pour aller vite ».

Mathieu Faivre

Et alors que tout commençait à se remettre dans le bon sens pour que Mathieu soit plus performant sur ses skis, c’est une nouvelle déconvenue qui l’attend à Berchtesgaden. Mathieu participe à un Géant de Coupe d’Europe. La journée est très particulière avec un lever très tôt pour rejoindre le lieu de course, une piste pas très compliquée mais des conditions de ski plus que moyennes, et au final un résultat catastrophique. Mathieu termine 26e. « Après cette course j’ai beaucoup douté. Je me suis dit qu’après tout le travail réalisé sur les skis, cela n’avait absolument rien fait évoluer ! ».

Mathieu digère assez rapidement cet épisode de Coupe d’Europe et repart à l’entraînement avec toujours cette ferme volonté d’appliquer la stratégie définie avec son équipe. Une stratégie construite autour de toute une série de petites évolutions très progressives qui, mises bout à bout avec efficacité et dans le bon ordre, donneront le résultat que l’on connaît à l’arrivée.

C’est ainsi que la plus-value apportée par les nouveaux skis va donner à Mathieu plus de confiance pour lui permettre ensuite de mieux s’exprimer et d’avoir plus de plaisir sur les skis.  Ce retour vers la confiance va se construire progressivement, étape par étape.  

« La confiance s’est construite jour après jour, à chaque journée d’entraînement en allant chercher plus loin, avec plus de risques et en voyant que cela passe, que c’est plus rapide et plus stable ».

Mathieu Faivre

Au niveau mental, Mathieu est accompagné depuis deux saisons par Thomas Sammut. Après avoir lu un de ses livres, Mathieu s’est reconnu dans les propos de celui qui accompagne notamment Florent Manaudou et a décidé de travailler avec lui. Cet accompagnement est fait de beaucoup d’échanges pour trouver ce qui convient le mieux à Mathieu, ce qui est pertinent afin qu’il soit bien en phase avec lui-même, avec son ski et avec ses performances.

La suite de l’histoire est connue. La victoire de Mathieu Faivre dans le parallèle des Championnats du monde après une journée épuisante et riche en émotions. Puis l’improbable mais bien réel titre de champion du monde en Géant. Et encore la victoire dans le Géant de Bansko il y a seulement une semaine après une seconde place la veille !

Rétrospectivement, c’est sans doute le cumul de petites évolutions inscrites dans une stratégie construite avec son équipe qui ont permis à Mathieu Faivre de reprendre confiance et basculer dans un mode « Champion du monde » à Cortina.

Consécration pour Mathieu Faivre à Cortina avec le titre de Champion du monde de géant – Photo: Pier Marco Tacca/Pentaphoto

« Sans le soutien et l’aide de mes entraîneurs et sans l’aide de mon technicien ski, je ne pourrais pas faire ce sport et le faire comme je le fais ».

Mathieu Faivre

A propos de l’équipe qui entoure Mathieu Faivre

Trois entraîneurs : Fréderic Perrin, Kevin Page et Romain Velez qui assure également la préparation physique de Mathieu.

Un technicien ski : Matteo Fattor qui travaille uniquement pour Mathieu.