Alexis Pinturault vient tout juste de clôturer une nouvelle saison de ski alpin marquée par son titre de Champion du monde du combiné remporté à la maison, mais aussi par des résultats en progression constante et un retour sur le devant de la scène du ski alpin mondial.
Entretien avec le skieur de Courchevel qui dresse un bilan de sa saison dans chacune des disciplines, revient sur les Mondiaux de Courchevel Méribel et annonce un changement significatif dans son équipe.
ALEXIS PINTURAULT ET LA DESCENTE
Alexis Pinturault a pris le départ de 4 descentes en Coupe du monde cette saison à Lake Louise, Beaver Creek, Aspen et Soldeu. Il n’a marqué aucun point et son meilleur classement a été une 24e place aux Finales à Andorre.
« Aller vers cette discipline va m’apporter de la nouveauté et de la fraîcheur »
« Je pense que sur les 4 courses que j’ai faites, il y avait des conditions particulières. A Aspen où j’ai fait une course plutôt correcte, il n’y a pas eu d’éléments extérieurs qui ont dégradé la course ou donné des mauvaises conditions. Par contre, pour les 3 autres, il y a eu des éléments extérieurs qui faisaient qu’au-delà des dossards 20 ou 25, il était très difficile de faire une belle course.
Mon bilan en descente n’est pas terrible puisque je marque 0 point. Si je veux marquer des points, puis me rapprocher d’un podium, il y a du boulot ! Je pars de loin et les axes de travail sont très nombreux.
Le premier d’entre eux, c’est la pratique de la discipline parce que je ne me suis pas entraîné en descente depuis 7 ou 8 ans, date à laquelle j’étais allé à La Parva au Chili. L’été prochain, je serais avec le groupe de vitesse pour m’entraîner en descente et en Super-G lors du stage en Amérique du Sud.
Je pense aussi qu’il sera très intéressant que j’aille travailler ma position de recherche de vitesse dans le tunnel d’une soufflerie pour essayer d’aller encore plus vite sur mes skis.
On va aussi travailler notre parc de skis de descente. C’est extrêmement important de faire des tests de glisse pour identifier les skis qui sont les plus rapides. Il faut ensuite mettre ces skis à l’entraînement et les apprécier dans les courbes.
Au niveau de ma mise en action, ce qu’on appelle le « starter », il y aura des adaptations à faire notamment avec les skis longs.
La difficulté pour moi restera très certainement mon poids. La descente, c’est une discipline où on va vers le bas ! Donc le poids influe sur la performance. Je n’irais jamais aux alentours des 100 kilos comme Kilde par exemple car c’est beaucoup trop pour moi. Par contre, me rapprocher des 90 kilos me semble être un objectif atteignable.
Sur cette discipline, il va y avoir un énorme travail d’analyse et de patience ».
ALEXIS PINTURAULT ET LE SUPER-G
Durant cette saison 2022/2023, Alexis Pinturault a disputé 8 Super-G en Coupe du monde. Il s’est classé 5e au classement de la discipline et a marqué 253 points, ce qui représente 30% de sa performance globale au classement général de la Coupe du monde. Sa meilleure performance a été sa 3e place au Super-G de Beaver Creek aux Etats-Unis.
« Ma saison en Super-G a été une belle surprise »
« Dès les entraînements, il y avait des choses qui allaient dans le bon sens. Mais il y a une grande différence entre sentir une amélioration à l’entraînement et que cela se traduise sur les courses.
Ma saison a été très positive. Ce qui a été aussi très intéressant, c’est que sur certains profils, comme à Wengen, j’ai réussi à faire jeu égal sur la partie de glisse du début jusqu’à la fin avec Kilde qui gagne la course.
Il y a deux Super-G, celui des Championnats du monde et celui de Beaver Creek, où je suis très proche de la victoire, chaque fois à 20 centièmes du vainqueur. Cela montre qu’il y a des petites choses que je peux certainement aller chercher en améliorant mon expérience dans le milieu de la vitesse.
Il y a aussi des endroits où je ne m’attendais pas à être très bon et où j’ai progressé. J’ai notamment gagné en régularité pour désormais aller chercher le meilleur dans cette discipline. Mais il reste encore du travail. Je dois gommer les courses où je fais de moins bons résultats. Il faudrait que j’arrive à rester davantage dans le Top 7/Top 8 comme Kriechmayr par exemple. Si on regarde Odermatt ou Kilde, on est encore un cran au-dessus car ils ne quittent pas le Top 5.
Donc ma saison de Super-G a été une belle surprise, surtout dans le sens où j’ai accordé peu de temps à cette discipline. Je pense aussi que si je m’améliore en descente, cela influera sur mes performances en Super-G ».
ALEXIS PINTURAULT ET LE GEANT
De Solden à Soldeu, Alexis Pinturault a pris le départ de 10 géants en Coupe du monde. 5e au classement de la discipline, le skieur de Courchevel a marqué 409 points en géant, soit quasiment la moitié du total de ses points au classement général. Sa meilleure performance a été sa 2e place au premier géant de Kranjska Gora.
« En géant, ma saison n’a pas été très simple »
« On est parti de tellement loin avec le matériel, mes sensations sur les skis et l’héritage de l’année dernière. Ensuite, on s’est amélioré au fur et à mesure de la saison. Cela n’a pas été forcément très simple et il a fallu beaucoup travailler. On y a passé beaucoup de temps avec pas mal de discussions et beaucoup de développements. On a essayé énormément de choses et cela nous a pris beaucoup d’énergie.
Finalement, cela a été très gratifiant de voir l’évolution en fin de saison avec ces 2 podiums qui se sont enchaînés. C’est vraiment très positif quand on se souvient qu’au début on était dans le flou et on ne savait pas vraiment dans quelle direction aller !
Mon géant référence cette saison a été celui de Kranjska Gora. Si on regarde au niveau des manches, j’ai réussi de belles performances sur la première manche de Soldeu ou encore sur la deuxième manche des Championnats du monde ».
ALEXIS PINTURAULT ET LE SLALOM
Alexis Pinturault a pris le départ de 9 slaloms cette saison en Coupe du monde. Il a terminé 17e au classement de la discipline et a marqué 177 points ce qui représente environ 20% de son score global de la saison. Alexis a signé sa meilleure performance de la saison, une 5e place, sur la Face de Bellevarde de Val d’Isère, en décembre dernier.
« Depuis 2 à 3 années, je trouve que les choses ne fonctionnent pas tout à fait comme je les aime dans cette discipline ».
« Depuis 2 à 3 années que je trouve que les choses ne fonctionnent pas tout à fait comme je les aime dans cette discipline. Cela a été surtout le cas dans certaines conditions bien précises, puis particulièrement sur les neiges glacées. J’ai rencontré énormément de difficultés et on l’a bien vu notamment sur les slaloms où je n’ai pas réussi à prendre pas la qualification pour la deuxième manche. Par contre, quand j’ai skié dans des conditions plus hivernales, comme à Val d’Isère ou à Palisades Tahoe, ou alors sur une neige salée, mon matériel a bien réagi et a beaucoup mieux fonctionné.
Durant cette saison, j’ai mis la priorité sur le géant en ce qui concerne le développement du matériel et la recherche d’améliorations. Il fallait faire des choix, je ne pouvais pas faire les 2 (géant et slalom) car cela m’aurait pris trop de temps.
Aujourd’hui, je pense que le matériel prend une part dans la performance qui est beaucoup plus importante qu’elle n’en prenait par le passé. A l’époque, je pense que la performance physique, technique et mentale de l’athlète faisait 95% voire même plus de sa performance. Et aujourd’hui on sous-estime cette part grandissante du matériel dans les résultats des athlètes ».
ALEXIS PINTURAULT ET LES CHAMPIONNATS DU MONDE
Beaucoup de skieurs rêvent de briller à la maison et Alexis Pinturault l’a fait. En remportant le titre de Champion du monde du combiné, puis la médaille de bronze en Super-G chez lui sur la neige de Courchevel, Alexis a dépassé ses objectifs fixés pour cette saison. Il s’est également classé 7e du géant, 20e du slalom et 11e du parallèle individuel.
« Ces Championnats du monde, à la maison, ont été pour moi vraiment extraordinaires »
« Durant ces Championnats du monde, j’avais envie d’être le meilleur, de performer et de pouvoir le concrétiser a été extraordinaire. Le meilleur de mes rêves, c’était de pouvoir ramener une médaille d’or à la maison, peu importe la discipline. C’était l’objectif numéro un de mes Mondiaux et largement l’objectif numéro un de toute ma saison.
Je me souviens que lorsque j’ai quitté Schladming (dernière course d’Alexis avant les Mondiaux), notre programme des Championnats du monde était déjà décidé depuis longtemps, avec notamment la décision de ne pas participer au slalom de Chamonix.
Après avoir pris quelques jours de repos à Monaco, on a repris l’entraînement à Courchevel. Tout a été fait pour qu’on se mette en situation par rapport aux courses des Mondiaux. Je m’entraînais sur le stade Emile Allais de Courchevel à 14h, car cela correspondait à l’horaire de la 2e manche du combiné. Je m’entraînais également dans des conditions de luminosité similaires à ce que j’allais trouver en course. On a aussi tout fait pour avoir les mêmes conditions de neige pour bien mettre au point notre matériel.
On a ainsi réussi à se préparer de la meilleure des manières pour arriver dans la meilleure des situations et avec le plus de sérénité pour être performant. « Titou » (Stéphane Quittet) a beaucoup insisté sur tous ces aspects. Je pense que cela a fortement contribué à mes résultats.
Mon objectif a été réalisé et même dépassé grâce aussi à ma 2e médaille (le Bronze en Super-G) qui a été une cerise sur le gâteau.
Ces Championnats du monde à Courchevel Méribel ont été pour moi extraordinaires ».
CLASSEMENT GENERAL DE LA COUPE DU MONDE
Pour sa 13e saison en Coupe du monde, Alexis Pinturault s’est classé 8e au classement général et a marqué 839 points.
« Cette année, mon positionnement mondial était anecdotique »
« Ma priorité, c’étaient les Championnats du monde et de retrouver au fur et à mesure mon meilleur niveau. Mon positionnement mondial était anecdotique cette année. Je savais d’où je partais notamment en géant, cette discipline qui en principe m’apporte le plus de points.
Pendant cette saison, il a fallu beaucoup travailler. Au final, c’est aussi une saison où mes objectifs ont été pleinement remplis.
J’espère que grâce à ce qu’on a pu démêler cet hiver, on travaillera de la meilleure des manières cet été afin d’aborder la saison prochaine pour aller chercher tout de suite de meilleurs résultats ».
DES CHANGEMENTS DANS LA TEAM ALEXIS PINTURAULT
Cette fin de saison sera synonyme de changements dans la Team Alexis Pinturault avec le départ de Titou (Stéphane Quittet) et Nicolas Thoule.
« Pour des raisons personnelles, mes deux entraîneurs Titou et Nicolas nous quittent en cette fin de saison. Ils ont souhaité consacrer plus de temps dans l’avenir à leurs familles. Le reste de l’équipe restera inchangé.
C’est à nouveau un gros changement mais cela ne m’inquiète pas. C’est aussi une belle opportunité pour faire ce virage vers la vitesse et pour trouver un entraîneur qui m’apportera certaines choses tout en restant très bon en géant. Il faut trouver les bonnes personnes pour les remplacer et avec la Fédération, et notamment avec David Chastan, on a déjà identifié quelques noms. Il faut maintenant que l’on décide ».
